Vie de Jeanne de Pourlan

Publié le par pourlan

Jeanne de Pourlan

Jeanne de Pourlan

Eléments biographiques

d'après BOURREE (écrivant sous l'anonymat), Vie de Madame de Courcelle de Pourlan, Lyon, 1699.

 

 

Née à Pourlan « ancienne baronnie située sur les frontières du duché de Bourgogne » le 2 avril 1591 (aujourd’hui Pourlans, petite commune située en Saône-et-Loire, aux confins du Doubs et de la Côte-d’Or). Fille aînée de M. de Courcelle, Baron de Pourlan et d’Auvillars (c’est à Auvillars, petite commune de Côte-d’Or, non loin de Cîteaux, que réside habituellement la famille. Le château existe toujours, il appartient au baron de Cointet), et de Dlle de Drée. Famille paternelle et maternelle de vieille noblesse, alliée au cardinal de la Rochefoucauld, et semble-t-il à saint Bernard. Née prématurée, son père la voue à Dieu dès sa naissance.

 

A sept ans, selon un usage courant dans les familles nobles de la région, on la met en pension à l’abbaye de Tart dont sa tante Claude de la Tournelle est abbesse. Mais sa santé fragile impose à ses parents de la reprendre chez eux après sept ans passés dans le monastère. A l’âge de quinze ans, son père l’emmène à l’abbaye de Migette (dans le Doubs, commune de Crouzet-Migette, non loin de Salins-les-Bains), monastère de Clarisses. Elle décide d’y rester de son propre chef, malgré l’opposition de ses parents qui la ramènent un moment de force chez eux, et prend l’habit en 1607.

 

A Migette, comme dans la plupart des abbayes avant la réforme de Trente, on ne respecte guère la vie religieuse, et encore moins les idéaux franciscains : les sœurs reçoivent des pensions de leurs familles (cent francs par religieuse) et vivent dans de petits appartements. Bourrée estime toutefois que « Ces religieuses… pouvaient passer pour réglées en comparaison de beaucoup d’autres » [1]. Jeanne de Pourlan semble s’y être essentiellement consacrée à la musique et au chant, et y avoir mené la vie d’une pieuse religieuse de son temps.

 

En 1617, Anne de Boisselet, abbesse de Tart, décide de renoncer à sa charge et pressent Jeanne de Pourlan pour lui succéder. Celle-ci finit par accepter, malgré son opposition initiale, sous la pression de l’abbé de Cîteaux qui la menace d’excommunication si elle persiste dans son refus. Elle prend l’habit à Tart en décembre 1617.

 

Jeanne découvre à Tart une communauté moins édifiante encore que celle qu’elle avait connue à Migette : « Le monastère n’était plus qu’un grand chemin passant, ou comme une hôtellerie, jamais dégarnie de monde, hommes et femmes… La solitude et l’oraison mentale en étaient bannies ; on y dansait et jouait comme dans une maison séculière… Elles avaient tellement ajusté leurs habits qu’on n’y connaissait plus rien de religieux que le voile et la guimpe qui étaient encore mis de manière qu’ils ne les empêchaient pas de se friser, se découvrir, porter des pendants d’oreilles et des fils de perles à leur cou. » [2]

 

La nouvelle abbesse semble avoir eu l’intention de réformer sa communauté dès son arrivée. Elle se heurte à l’opposition générale et décide de prêcher par l’exemple. Autre difficulté : la situation financière précaire de la maison empêche de faire les travaux indispensables à la stricte observance de la règle (rétablissement de la clôture, création d’un parloir, séparation dans l’église entre les religieuses et les hôtes). Elle peut toutefois s’appuyer sur des sœurs qui souhaitent elles aussi la réforme : Mme de Longueval, qui lui demande de rester à Tart quand elle est tentée par le découragement, et quelques autres.

 

A la même époque se répand dans la région un fort mouvement de dévotion envers une statue de bois représentant la Vierge, sculptée en Belgique à l’imitation d’une autre œuvre à laquelle on attribuait des miracles de guérison (Notre-Dame du Chêne, à Diest dans le Brabant). La statue étant confiée aux capucins de Gray, Mme de Longueval se décide à y faire un pélerinage[3]. « Un jour, dans la ferveur de son oraison, nous dit Bourrée [4], elle entendit distinctement une voix venant de la sainte Vierge, qui lui dit ces propres paroles : Ne doute pas que je ne t’accorde ce que tu me demandes, la réforme se fera sans doute, et je me servirai pour cela de l’évêque de Langres. Jeanne se montre d’abord sceptique, mais se décide à faire elle-même le pèlerinage de Gray, sans doute en action de grâces pour sa propre guérison (elle se remet de la variole), et en revient plus décidée que jamais à poursuivre la réforme et à commencer par se l’appliquer à elle-même.

 

En 1622, elle se rend à Auvillars pour assister son père dans ses derniers moments. Pendant ce temps, Sébastien Zamet, évêque de Langres, en visite pastorale à Saint-Jean de Losne, se rend à Tart à l’invitation de Mme de Longueval. Il y est reçu le 2 juillet 1622 par Mme de La Tournelle, coadjutrice, qu’il convertit à la réforme. Constatant la dégradation de la vie religieuse à Tart, il décide d’y retourner ultérieurement pour une visite plus longue, sous le prétexte de donner la confirmation aux religieuses qui ne l’avaient pas reçue. Cette seconde visite a lieu le 5 juillet. La célébration de la confirmation donne à Zamet l’occasion de prêcher vigoureusement en faveur de la réforme. La communauté commence alors à se diviser entre réformatrices et non-réformatrices : une religieuse demande même à quitter Tart pour entrer à la Visitation de Dijon, tout récemment fondée par Jeanne de Chantal.

 

Zamet n’a aucun pouvoir pour décider de la réforme d’un couvent de cisterciennes : celles-ci sont en effet soumises à la juridiction des abbés de Cîteaux. Il décide toutefois d’une troisième visite à Tart, sous le prétexte d’y rencontrer l’abbesse, de retour d’Auvillars. Ce voyage a failli lui coûter la vie : le 19 août (veille de saint-Bernard), des pluies torrentielles ont fait sortir la Saône de son lit, et le carrosse épiscopal se trouve emporté par le courant, à tel point « qu’on ne voyait plus que la tête des chevaux » [5]. L’équipage parvient toutefois à se réfugier dans la maison d’un charbonnier, où le prélat fait sécher ses habits, et arrive à Tart pour la messe.

 

Cette première rencontre entre Zamet et Mme de Pourlan semble avoir été déterminante pour la poursuite de la réforme. Zamet y découvre en effet une abbesse selon son cœur, partageant ses projets de retour à la vraie vie religieuse ; Jeanne se déclare prête à lui confier la direction de la maison, et demande aux sœurs de se confier à lui individuellement. A la suite de ces entretiens, deux autres religieuses, Catherine de Coraille et Lucrèce de Mélitin de Lagot, décident de rejoindre le camp des réformatrices (en opposition à leurs familles [6]).

 

Un quatrième voyage de Zamet à Tart, à l’automne 1622, révèle à quel point l’opposition à la réforme dépasse largement le seul cadre du couvent : son cocher s’étant égaré et se retrouvant à Mirebeau, il échappe par miracle à une embuscade tendue par un groupe de nobles du voisinage, furieux d’apprendre qu’une religieuse avait quitté l’abbaye pour rejoindre la Visitation de Dijon. Lors de ce quatrième séjour, Mme de Boisselet, nièce de l’ancienne abbesse, se laisse elle aussi gagner à la réforme. Zamet se décide alors à aviser de ses projets Nicolas Boucherat, abbé de Cîteaux et supérieur légitime du monastère.

 

Boucherat n’est pas hostile à la réforme. Il en mesure toutefois la difficulté dans son propre monastère, et se déclare simplement prêt à soutenir Zamet dans ses efforts. Zamet retourne alors à Tart, où il commence la direction des religieuses par des entretiens sur l’oraison mentale (exercice qui est alors inconnu des cisterciennes). Il délègue ensuite la direction à deux oratoriens, les frères Gault (futurs évêques réformateurs de Marseille), puis aux pères Bence et Le Jeune : les oratoriens sont en effet les fers de lance du travail de réforme que l’évêque accomplit par ailleurs dans son diocèse.

 

A Tart, la division s’accroît entre réformatrices et conservatrices, d’autant qu’on parle du déménagement du couvent pour l’installer à Dijon [7]. Jeanne de Pourlan, fidèle à la tactique qu’elle a choisie dès le début, préfère la persuasion et l’exemple au recours à la force (elle n’a, de toute façon, aucun moyen d’agir dans ce domaine) : elle quitte l’habit d’étoffe précieuse pour un habit de serge grossière, se coupe les cheveux (geste qui lui occasionne sur le coup beaucoup de chagrin), se sépare du mobilier de son appartement et des cosmétiques qu’elle continuait à utiliser. Elle instaure pour les religieuses volontaires l’oraison mentale quotidienne, vend son carrosse et ses chevaux, et lors du déménagement à Dijon donnera congé à ses domestiques.

 

A son retour à Tart en février 1622, Zamet constate avec satisfaction les progrès de la réforme : « Il n’est pas besoin de maître, déclare-t-il, quand le Saint Esprit en sert lui-même » [8]. Il décide alors, d’accord avec l’abbesse, de l’installation à Dijon des cinq réformatrices, qui mènent déjà une vie séparée des autres dans l’enceinte du couvent (à la tête des neuf conservatrices figure Mme de Boisselet, l’ancienne abbesse). Les réformatrices décident de changer de nom, Mme de Pourlan choisissant celui de Jeanne de saint Joseph. Dom Boucherat, pour la forme, vient visiter l’abbaye, confirme le désir de réforme et constate la division de la communauté. En 1623, un chapitre général de l’ordre de Cîteaux répond favorablement à la demande de translation à Dijon, bien que les réformées soient minoritaires [9] ; les sœurs refusant le déménagement reçoivent l’autorisation de se retirer dans d’autres maisons religieuses, et conservent leurs pensions et leurs revenus personnels. Une religieuse reste à Tart pour veiller au bon ordre des affaires et continuer à payer les domestiques.

 

Rien n’étant prêt pour les recevoir à Dijon, les six religieuses s’installent à la Visitation [10], puis dans une maison que Zamet leur met à disposition rue du Verbois[11] et qu’elles installent sommairement, « commençant par là à coucher sur la dure, comme la règle de Saint Benoît les y obligeait » [12]. Comme les sœurs résistantes se refusent à quitter Tart, le mobilier et l’argent tardent à arriver. D’autre part, le Parlement de Bourgogne, qui n’a pas été consulté comme cela aurait dû être fait, leur refuse le droit d’avoir le saint-Sacrement dans leur chapelle et de chanter l’office en public. Zamet n’a cure de cette opposition, vient célébrer une messe solennelle pour leur installation, installe le saint-Sacrement. Les réformées finissent par récupérer les titres de propriété de Tart, qui avaient été cachés par les anciennes au château de Rouvres. Les résistantes finiront par quitter Tart et se retirer dans leurs familles.

 

La nouvelle communauté peine au début à faire des émules : dès la première année (1623), deux postulantes se présentent, mais choisissent finalement une autre maison religieuse. Deux autres, plus résistantes, mourront après quelques années au monastère. Deux converses finissent également par se présenter (les converses avaient disparu de l’ancien monastère depuis longtemps au profit d’une nombreuse domesticité). Quelques anciennes reviennent : Mme Bellerin, Mme de la Tournelle (sœur de la coadjutrice).

 

La maison de la rue du Verbois étant construite sur un terrain trop exigu pour permettre la construction d’un monastère conforme à l’observance, Zamet achète une maison entourée d’un vaste terrain rue des Crêts, à la limite sud de la ville, dans un quartier plus calme : « on y fit de petites cellules, un réfectoire, en sorte que hors le cloître qui n’y était pas, tous les autres lieux réguliers s’y trouvaient »[13]. Les travaux d’aménagement sont dirigés personnellement par Zamet, qui peut, le 2 juin 1624, installer enfin les Bernardines réformées dans leur nouveau monastère. Cette installation revêt le caractère d’un grand événement : pour lui donner toute la solennité voulue, Zamet convoque tout le clergé dijonnais, qui accompagne les treize sœurs en procession à travers la ville en portant le saint-Sacrement. Le Parlement lui-même, apparemment réconcilié, est du voyage, et les rues de la ville sont décorées. La procession ne manque pas une étape importante : la Sainte-Chapelle, où est exposée l’hostie encore marquée de traces de sang versées miraculeusement deux siècles auparavant.

 

Pour achever la réforme, évêque et abbesse décident de retirer l’abbaye de la juridiction de Cîteaux pour la confier à l’évêque diocésain, et de demander l’élection de l’abbesse (pour des mandats de trois ans)[14]. Il s’agit en effet d’assurer l’indépendance de la nouvelle communauté vis-à-vis des cisterciens en majorité défavorables à la réforme, d’autant plus qu’à dom Boucherat a succédé Pierre Nivelle (devenu ensuite évêque de Luçon), un abbé conservateur. La nouvelle étape, qui occasionne à nouveau de grands débats dans la communauté (une religieuse décide en effet de quitter la maison), est franchie en 1626, après bien des difficultés. Zamet l’impose par un véritable coup de force : comme le bruit courait qu’on voulait emprisonner les réformatrices et fermer le monastère, il demande à Coligny et à son régiment d’occuper Talant et Fontaine, menaçant ainsi Dijon au cas où les rumeurs se confirmeraient. En 1629, Mère Jeanne de Saint-Joseph se démet alors de ses fonctions abbatiales ; la mère Marie de Saint-Bernard est élue pour trois ans, et sœur Marguerite de La Croix devient prieure (les nouveaux statuts ne prévoyant pas de coadjutrice). Jeanne reste cependant maîtresse des novices.

 

Jeanne de Pourlan ne dure guère dans sa nouvelle charge : Zamet, qui assure depuis quelques temps la direction de Port-Royal, projette d’unir les deux monastères en un seul, et de fonder un nouvel institut religieux : l’Institut du Saint-Sacrement, dans lequel la mère Angélique Arnauld devrait jouer un rôle important. Pour assurer le jumelage des deux abbayes, il organise un échange : Jeanne de Saint-Joseph quitte Dijon avec six autres religieuses pour Port-Royal de Paris, où elle est accueillie avec transports par la mère Angélique ; elle est élue prieure et nommée maîtresse des novices. En échange, la mère Agnès, sœur d’Angélique Arnauld, s’installe à Dijon où elle est élue Abbesse, avec quelques sœurs parisiennes.

 

Les premiers projets d’Institut prévoyaient qu’il serait composé de la fusion de trois maisons : Tart, Port-Royal, et le Lys dans le diocèse de Sens. Mais Zamet décide finalement d’acheter une maison dans Paris, rue de La Coquilière (derrière le Louvre), et y installe Angélique Arnauld avec quelques sœurs. Il avait souhaité que Jeanne de Saint-Joseph fasse partie du nombre[15], mais l’un des trois évêques fondateurs du nouvel ordre (est-ce Gondi ? Bellegarde ?) s’y oppose absolument, la jugeant trop proche de Zamet. Ce dernier demande alors à Jeanne de rejoindre les sœurs de Dijon, ce qu’elle fait le 8 septembre 1635. Agnès de Saint-Paul Arnauld reste encore deux mois à Dijon, et retourne à regret à Paris pour rejoindre son monastère d’origine. Au bout de quelques mois, opposé à Saint-Cyran qui prend un ascendant considérable sur les religieuses, Zamet abandonne son projet d’institut et se retire lui aussi dans son diocèse. Pour les moniales de Port-Royal, c’est le début de l’aventure janséniste ; d’autres épreuves, causées par les malheurs du temps, attendent celles de Dijon.

 

L’année suivante (1636), Jeanne est réélue abbesse. Cette même année, alors que la guerre de trente ans ravage la région, les troupes impériales du général Gallas, qui ne peuvent arriver à prendre la ville de Saint-Jean de Losne, se jettent sur les environs. Les impériaux pillent l’abbaye de Tart et ses dépendances, utilisant l’église comme écurie, détruisant les œuvres d’art qui l’ornaient et brûlant fermes et maisons alentour. La communauté se trouve ainsi privée de ses revenus, et les sœurs bientôt à court d’argent commencent à s’endetter, puis à mendier de quoi se nourrir et se vêtir. Jeanne prend le parti de s’en réjouir : « Nous commençons à présent à être vraiment religieuses, puisque nous souffrons quelque chose pour Dieu, qui nous fait voir, en nous rendant participantes de la vie pauvre et laborieuse de son fils, que la nôtre ne lui déplaît pas ». [16]

 

Les sœurs décident de se mettre à travailler de leurs mains, chose inconcevable pour des filles de la noblesse : elles fabriquent de menus objets de piété en paille, ce qui fait dire aux Dijonnais : « Les Bernardines vivent de paille ». Ces objets rencontrent dans le public un succès certain, qui leur permettra de vivre pendant plus de huit ans, en attendant la fin des troubles et le retour des revenus des terres abbatiales.[17]

 

Jeanne accomplit encore deux mandats comme abbesse, puis retourne à un état de simple religieuse : on la met à l’apothicairerie avec les converses, puis au tour où elle épuise ses forces. Elle a la joie d’accueillir une repentante de l’ancien Tart : la vieille mère de Boisselet, qui revient à la maison de Dijon en 1645, renonçant à sa pension dont elle fait don à la communauté.

 

A la fin du triennat de celle qui lui avait succédé, en 1646, elle est à nouveau, et sans doute toujours contre son gré, élue abbesse. Elle se met alors à un travail important : la rédaction des statuts du nouveau monastère, qui sont approuvés par Zamet en 1650 [18]. Cela lui donne l’occasion de revoir son vieil ami, désormais tout entier adonné à la réforme de son diocèse après la déception causée par l’échec de l’Institut de Saint-Sacrement.

 

La même année 1650, Jeanne de Saint-Joseph tombe malade. Sa fatigue ne l’empêche pas de recevoir, au carême 1651, la reine Anne d’Autriche, régente, et le roi lui-même qui lui adresse à la grille du cœur un petit compliment (Louis XIV a alors douze ans). La reine lui rend visite à plusieurs reprises et s’entretient à chaque fois longuement et secrètement avec elle. Bourrée pense que le sujet de ces entretiens était la réforme de l’abbaye Saint-Bénigne : c’est en effet à la suite de ces visites que les Mauristes ont été appelés à Saint-Bénigne pour remplacer les Bénédictins.

 

La maladie l’oblige, malgré ses protestations, à manger de la viande en carême. Après Pâques 1651, son état empire ; elle continue malgré tout à participer à toute la vie de la communauté, jusqu’à la fête de Saint Marc où elle s’effondre pendant la procession. Zamet, lui aussi malade, ne peut venir l’assister pour ses derniers instants ; il envoie le Père Foissy, oratorien. Elle reçoit les derniers sacrements des mains de Monsieur Gauthier, confesseur du monastère, et meurt le matin du 16 mai 1651, entourée de toutes ses sœurs, après leur avoir demandé pardon et les avoir exhortées longuement, pendant que monsieur Gauthier lisait le récit de la Passion selon Saint Jean et au moment, dit-on, où le Christ rend l’Esprit.

 

Sa mort a un grand retentissement dans Dijon, où elle est déjà considérée comme une sainte. Ses obsèques sont l’occasion de nombreuses manifestations de piété à la grille du couvent, où beaucoup de monde essaye de toucher son corps. D’abord enterrée sous l’autel de l’église provisoire, elle est ensuite inhumée dans la nouvelle église construite au début du XVIII° siècle.



[1] BOURREE, Vie de Mme de Pourlan, p. 27

[2] Id., p. 48. Peut-être Bourrée, dont l’ouvrage est hagiographique, exagère-t-il la situation ? Son témoignage en recoupe d’autres sur d’autres abbayes : ainsi, à Maubuisson, l’abbesse d’Estrées élève-t-elle les bâtards de sa sœur Gabrielle avec ses enfants et ceux des autres religieuses. Tart, en définitive, ne semble pas avoir été aussi loin dans les abus.

[3] On retrouve dans cette anecdote l’importance jouée par les capucins au début de la réforme des ordres monastiques : c’est à la suite de la prédication du père Archange de Pembroke qu’Angélique Arnauld se lance dans la réforme de Port-Royal.

[4] Vie de Mme de Pourlan, p. 73

[5] Id., p. 116

[6] C’est Bourrée qui mentionne l’attitude hostile des familles, sur laquelle il reviendra souvent. On a là sans doute une des clés qui permettent de comprendre les motivations des opposants à la réforme : d’importants intérêts patrimoniaux sont en jeu, les religieuses étant dotées et pensionnées par leurs parents, et libres à leur mort de disposer de leurs biens comme elles l’entendent. La réforme, qui implique l’abandon de ces biens en faveur de la communauté, signifierait la fin de cette liberté, qui donnait aux familles l’occasion de récupérer le capital investi du vivant des religieuses.

[7] Le mouvement d’installation des monastères de femmes de la campagne vers la ville est un des traits caractéristiques de la réforme religieuse au XVII° siècle. Il est motivé à la fois par l’insécurité croissante due aux guerres, par des considérations d’hygiène (les monastères médiévaux étant souvent en très mauvais état), et par la volonté de séparer les religieuses réformatrices des conservatrices. L’opposition au déménagement s’explique, elle, par des motifs économiques, les abbayes rurales étant sources de revenus importants.

[8] Bourrée, p. 134

[9] Bourrée (p. 144) relate par le menu l’opposition entre ancienne et nouvelle abbesse, et précise que pendant le chapitre général, Zamet (qui réside à Dijon chez les oratoriens) et Jeanne de St-Joseph prient jour et nuit devant le Saint-Sacrement : autre thème important de la réforme de la vie religieuse au XVII° siècle, qui annonce les futurs projets de Zamet en lien avec Port-Royal.

[10] Aujourd’hui clinique Sainte-Marthe, rue de la Préfecture

[11] Aujourd’hui partie nord de la rue Verrerie

[12] Bourrée, p. 151

[13] Id., p. 166

[14] Les mêmes décisions, au même moment, sont prises pour l’abbaye de Port-Royal. Louis XIII, guéri miraculeusement d’un maladie grave, renonce en action de grâces de sa guérison à son privilège de nommer les deux abbesses.

[15] Témoigne de cette première intention la bulle d’Urbain VIII reproduite dans Boullée, p. 229-232.

[16] Bourrée, p. 274

[17] Id., p. 276

[18] On a perdu ces statuts, dont on ne connaît qu’une version plus tardive mais sans doute assez proche de ceux de la mère Jeanne.

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